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Version approuvée par le ministère du Développement durable, de l'Environnement et de la Lutte contre les changements climatiques le 26 août 2016. Cette version n'est pas mise à jour en continu.

4.7 Perceptions erronées

Les bandes riveraines

Le cas du règlement R.A.V.Q. 301 de la Ville de Québec qui vise à renaturaliser les berges du lac Saint-Charles et de l’opposition des riverains à la mise en application de ce règlement dans le cadre du recours collectif permet de mettre en lumière certaines perceptions erronées qui circulent souvent par rapport aux bandes riveraines et d’apporter certaines précisions.

Une expropriation déguisée

Le 3 juin 2008, la Ville de Québec adoptait le règlement R.A.V.Q. 301 sur la renaturalisation des berges du lac Saint-Charles. La validité du règlement est confirmée par la Cour supérieure le 7 avril 2010 et par la Cour d’appel le 20 juin 2011.

Les riverains faisant appel du règlement ont soutenu que :

« l’implantation de cette bande de végétation leur avait fait perdre l’usage efficient de leur propriété et que le règlement entrepris équivalait à une confiscation de leur bien-fonds ou encore à une expropriation déguisée sans compensation. Ils prétendaient ainsi que l’intimée [la Ville de Québec] n’avait pas le pouvoir d’adopter une telle règlementation vu ses effets sur leur droit de propriété. »(Cour d’appel, 2011).

Il va de soi qu’une portion du terrain des riverains est allouée à la repousse de la végétation herbacée, d’arbres et d’arbustes, mais le règlement permet tout de même de conserver une visibilité du lac à partir de la propriété ainsi qu’un accès suffisant pour de nombreux usages. En ce sens, il ne s’agit pas réellement d’une expropriation.  De plus, les propriétaires riverains concernés ne perdent pas le droit de conserver et d’utiliser leur bâtiment. Autrement dit, l’utilisation des biens n’a pas été rendue impossible par le règlement selon les juges.

Le juge de première instance de la Cour supérieure a conclu qu’en vertu de l’article 19 de la Loi sur les compétences municipales (L.R.Q., c. C-47.1), la Ville de Québec avait le pouvoir d’adopter le règlement R.A.V.Q. 301. Un cadre législatif plus large venait appuyer sa décision soit :

  • la Loi sur la qualité de l’environnement (L.R.Q., c. Q-2);
  • la Politique de protection des rives, du littoral et des plaines inondables (R.R.Q., c. Q-2 r.35);
  • la Loi sur le développement durable (L.R.Q., c. D-8.1.1);
  • la Loi affirmant le caractère collectif des ressources en eau et visant à renforcir leur protection (L.R.Q., c. C-6.2).

En dehors de la décision juridique appuyée sur des considérations légales et législatives, une analyse du schéma de plantation des espèces arboricoles et arbustives en annexe IV du règlement permet de voir comment les propriétaires riverains concernés peuvent aménager leur terrain tout en continuant d’en retirer certains usages.

Tout d’abord, « lorsqu’un bâtiment principal est érigé dans la bande riveraine, la renaturalisation de la bande n’a pas à être réalisée dans la cour avant. » (Ville de Québec, 2013). Ensuite, « lorsqu’un bâtiment principal est érigé dans la bande riveraine à l’entrée en vigueur de ce règlement, la coupe de la végétation est permise à l’intérieur d’une bande de quatre mètres au pourtour du bâtiment ou de cette construction. » (Ville de Québec, 2013).

zoom_shemaUne fenêtre verte permettant une vue sur le lac peut être maintenue dans le cas où un bâtiment principal est présent sur le terrain. Cette fenêtre peut être large de 10 mètres si elle n’excède pas la largeur de la façade arrière. À l’intérieur de cette fenêtre de 10 mètres, une emprise de 4 mètres ne contenant que des herbacés est permise. De plus, un chemin d’accès en matériaux inertes ou un escalier d’une largeur de 1 mètre peut être aménagé à même l’emprise de 4 mètres (Ville de Québec, 2013).

Il est possible de respecter le règlement tout en combinant l’aspect esthétique de l’aménagement de son terrain et le respect du lac et de son environnement. Le Guide de mise en valeur riveraine peut venir au secours des riverains désireux de conserver les avantages d’être localisé en bordure d’un cours d’eau.

Le règlement n’aura pas d’effet sur la qualité des eaux du lac

Deux riverains du lac Saint-Charles ont écrit dans la rubrique « carrefour des lecteurs » du journal Le Soleil, le 5 février 2012 que « Ce règlement n’apportera qu’un changement cosmétique sans aucun effet probant ou mesurable sur la qualité des eaux du lac » (ARLSC, 2012). L’Association des riverains du lac Saint-Charles a publié le 6 février 2012 : « Rappelons-nous que 90 % du phosphore total du lac provient de la rivière des Hurons et qu’à peine 3 % peut être attribuable aux berges des riverains » (ARLSC, 2012).

En effet, la majorité du phosphore qui entre dans le lac Saint-Charles provient de l’amont de son bassin versant, soit de la rivière des Hurons ainsi que des stations d’épuration de Stoneham-et-Tewkesbury et de Lac-Delage.  Il n’en demeure pas moins que la revégétalisation des bandes riveraine est une mesure pouvant véritablement avoir un effet positif sur la qualité de l’eau. Il a d’ailleurs été largement démontré qu’une bande riveraine de protection joue de multiples rôles sur le plan environnemental, notamment la protection de la qualité de l’eau.

L’étude limnologique réalisée par l’Association pour la protection de l’environnement du lac Saint-Charles et des Marais du Nord (APEL) en 2008 fait ressortir la fragilité du lac à tout apport supplémentaire en phosphore (APEL, 2009) étant donné que ce dernier aurait atteint sa capacité de support. La renaturalisation des rives faisait partie des recommandations faites pour limiter tout apport supplémentaire en phosphore au lac.

En plus d’agir comme un filtre pour retenir les sédiments et les nutriments en provenance des eaux de ruissellement, les bandes riveraines procurent un écran contre le réchauffement en bordure du plan d’eau. Il a été démontré que l’éclosion des fleurs d’eau de cyanobactéries dépend plus fortement de la température de l’eau que de la concentration en phosphore dans l’eau (APEL, 2009).

Ensuite, les bandes riveraines constituent un rempart contre l’érosion des sols et des rives. Elles limitent ainsi l’apport de matières en suspension vers le lac en plus de protéger les riverains contre les pertes de sols de leur propriété.

Les bandes riveraines jouent enfin différents rôles qui ne sont pas tous directement reliés à la qualité de l’eau, notamment la présence d’habitats pour la faune et la flore et la régulation du cycle hydrologique.

 

Références

ASSOCIATION DES RIVERAINS DU LAC SAINT-CHARLES (ARLSC). 2012. Un jugement sans appel! En ligne: http://arlsc.wordpress.com/2012/02/06/un-jugement-sans-appel/. Consulté le 15 juillet 2013.

ASSOCIATION POUR LA PROTECTION DE L’ENVIRONNEMENT DU LAC SAINT-CHARLES ET DES MARAIS DU NORD (APEL). 2009. Étude limnologique du haut-bassin de la rivière Saint-Charles, rapport final. Association pour la protection de l’environnement du lac Saint-Charles et des Marais du Nord, Québec, 354 pages.

CORPORATION BASSIN VERSANT BAIE MISSISQUOI (OBVBM). 2012. Guide de mise en valeur riveraine : Protéger la qualité de vie des lacs et des cours d’eau. Édition 2012. En ligne: http://obvbm.org/nouvelles/public/Guide_de_mise_en_valeur_riveraine_-_edition_2012.pdf. Consulté le 16 février 2015.

COUR D’APPEL. 2011. Greffe de Québec. No 200-09-007031-104 (200-17-010451-086). Canada. Province de Québec. En ligne: http://www.ledevoir.com/documents/pdf/riverains.pdf. Consulté le 16 juillet 2013.

VILLE DE QUÉBEC. 2013. Règlement de l’agglomération sur la renaturalisation des berges du lac Saint-Charles. Règlement R.A.V.Q. 301. En ligne. http://reglements.ville.quebec.qc.ca/fr/ShowPdf/cr/R.A.V.Q.301.pdf. Consulté le 16 juillet 2013.

 

Mis à jour le 16 février 2015.

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